La visée

La visée est nourrie d’une marche nocturne que j’ai faite à travers la campagne en ligne droite, seul, en suivant l’azimut inscrit sur ma boussole jusqu’au feu de camp. Dans ce recueil, j’ai retraversé cette expérience en m’appuyant sur la méditation et la récitation des mantras. Au cours de ma rédaction, je me suis placé dans les traces de Gustave Roud, l’infatigable marcheur aux aguets des épiphanies de son coin de pays, en faisant confiance à l’intuition, à ces pentes minuscules qui me traversaient, en écho à ces autres pentes et ces autres intuitions que j’ai dû suivre au long de cette marche nocturne.

Les courbes rythmiques des oscillographies d’Anne Pantillon entrent en dialogue avec mes poèmes, ouvrent des espaces au lecteur qui devient marcheur à travers la nuit jusqu’au point de ralliement. Ces peintures portent en elles la visualisation à la fois concrète et abstraite du paysage ressenti. La plasticienne a utilisé la technique des empreintes pulsées : le déplacement de la trace du bras sur le papier relaie celle déposée par le marcheur dans le paysage, imprime par un mouvement rythmé les courbes de niveau de la carte géographique.

Le graphiste Victor Bringolf a choisi le papier calque et la reliure japonaise pour provoquer une participation active du lecteur, l’emmener sur le chemin du marcheur qui devine, tâtonne, revient sur ses pas, admire le ciel, une ombre, une étendue neigeuse, se laisse surprendre par une matière, une pente et donne à ses pieds les commandes. Ici, la main laisse apparaître des silhouettes, des jambages, des cursives, l’œil fait la mise au point. C’est aussi un jeu de pistes, les images se superposent, basculent d’une page à l’autre, se rencontrent, s’opposent. Dans cet esprit, Victor Bringolf a choisi le format d’un carnet de voyage, facile à tenir, à emporter, ainsi qu’une police de caractères évoquant l’outil de la visée : ronde comme la boussole, pointue comme son aiguille.

La visée a remporté le prix Tirage limité 2018 et a été présenté à différents plasticiens dont vingt-six ont envoyé un projet de livre-objet, maquettes qui ont été exposées dans une salle du musée Forel de Morges dans le cadre de l’édition 2019 du Livre sur les quais. Le projet lauréat de cette deuxième partie du concours est celui de Chantal Quéhen, superbe rouleau de plus de 7 mètres de long, impossible à réaliser sous forme de livre. Parmi les autres projets proposés, le livre imaginé par Anne Pantillon et le graphiste Victor Bringolf a tout de suite retenu mon attention ainsi que celle de mon éditeur Marcel Burger des Éditions À côté de cela, tant par l’intelligence et la finesse de sa conception que par sa capacité à être reproduit et publié à une plus large échelle.

On peut y voir […] une métaphore de l’écriture qui, elle aussi, erre dans l’incertitude avant de trouver son Orient. Les vers libres de La visée fourmillent d’indications visuelles, même brouillées par le noir. (Isabelle Rüf, Le Temps)

Cet ouvrage a été réalisé avec le soutien du Canton de Vaud, de la Ville de Lausanne, de la Loterie Romande, de la fondation Jan Michalski et de la fondation Leenaards, un immense merci à eux. Merci aussi à mon éditeur Marcel Burger ainsi qu’au comité et aux membres de l’association À vrai dire pour leur soutien dans la réalisation de ce projet.

Un vernissage aura lieu avant l’été, je vous tiendrai au courant grâce à ma newsletter.

Pour acquérir un exemplaire de La visée, rendez-vous sur le site des Éditions À côté de cela

Illustration de La visée © Anne Pantillon

Logos soutien visée